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Publié : 19 janvier 2015

Laïcité

« L’islam doit faire son aggiornamento »

Par Eddie AIT, Secrétaire Général adjoint du Parti Radical de Gauche, Conseiller régional d’Ile-de-France PRG et Trésorier national de l’association française des communes, départements et régions pour la Paix (AFCDRP).

Dès le 8 janvier, les gouvernements de très nombreux Etats ont condamné les attentats contre la Rédaction de « Charlie Hebdo », perpétués au nom du prophète Mahomet, et qualifiés de menace contre la paix, la liberté et la sécurité internationale.

Face à l’horreur, les Français, les peuples en Europe et dans le monde, étaient parvenus à former une véritable communauté de conscience dans le but d’éliminer la menace terroriste, le réseau « Al Qaïda » (qui a revendiqué les attentats) et les régimes islamistes radicaux qui apportent leur soutien à cette organisation.

Depuis le 7 janvier et suite aux 17 assassinats, de nombreuses réunions, séminaires et conférences se tiennent aux quatre coins du pays sur l’essence de l’islam ainsi que sur les relations entre cette religion ou ses disciples militants avec la civilisation occidentale.

Depuis le 7 janvier et suite aux 17 assassinats, nombreux sont les représentants de l’islam à déclarer que les auteurs des attentats ne pouvaient pas avoir agi au nom de l’islam. Il ne pouvait pas s’agir d’un djihad.

Mais le monde islamique n’est pas monolithique : l’islam, comme toutes les grandes religions, est enseigné et vécu différemment. Les querelles sont intenses entre les différents courants, les intégristes utilisant le Coran et les traditions aux fins d’une idéologie de la confrontation violente. Ils se réfèrent à la Sourate 47, Verset 35 : « …n’appelez pas à la paix alors que vous êtes plus haut… ».

Les fortes influences occidentales, en particulier les pressions de démocratisation, une nouvelle conception du rôle de l’Etat, l’accent mis sur les Droits de l’homme, l’idéal occidental du libre épanouissement personnel et l’individualisme marqué, ont conduit, dans les Etats islamiques, à des conflits et les ont même parfois soumis à des rudes épreuves. Rappelons que le seul objectif d’une guerre sainte peut être la défense du territoire. A cet égard, le concept de juste guerre n’est pas étranger au christianisme, comme en témoignent les écrits de Saint Augustin.

Par ailleurs, et, compte tenu de la progression rapide de la globalisation, le sentiment d’être culturellement noyé par un Occident économiquement et technologiquement « supérieur » pouvait conduire à un sentiment d’aliénation, d’une sorte de colonisation culturelle, et, par conséquent, à de forts mouvements de résistance.

Dans les Etats islamistes, la séparation du politique et du religieux demeure un rêve que les révolutions arabes auront éloigné un peu plus. Et, sur le plan des libertés individuelles, de la démocratie et de l’État de droit, les aspirations des citoyens n’ont pas été satisfaites.

A l’heure actuelle, l’islam se trouve donc dans une situation de bouleversement comparable à celle qu’avait connu l’Europe à l’époque de la Réforme et des guerres de religion, entrainant une certaine radicalisation. A titre d’exemple, Al-Azhar, principale autorité de l’islam sunnite basée en Egypte, estime que la publication de nouveaux dessins représentant le prophète Mahomet dans l’édition du 14 janvier dernier de Charlie Hebdo va « attiser la haine et ne sert pas la coexistence pacifique entre les peuples et entrave l’intégration des musulmans dans les sociétés européennes et occidentales. ».

Cependant, nous ne devons pas oublier qu’en Europe, la laïcisation ne s’est imposée que progressivement, au prix d’une forte opposition de certains représentants de l’Eglise romaine catholique qui ont joué un rôle ambigu dans les domaines de la démocratie, des droits humains et de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

L’islam doit faire preuve d’adaptation.

Un sursaut, comparable à l’aggiornamento de l’Église catholique, est attendu.

Pour l’amitié entre les peuples, il est devenu une urgence.