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Publié : 10 juillet 2015

Réforme territoriale

Jean-Marie Tétart : "Je ne suis pas partisan des méga-agglomérations"(WEBTELE2R)

Jean-Marie Tétart, député des Yvelines, n’a pas la langue dans sa poche. Il a abordé dans le cadre de cet interview l’exigence de la loi SRU et la création à la mode des méga-intercommunalités.

J2R : Quel est votre analyse de la réforme sur la transition énergétique dans l’immobilier existant ?

J-M Tétart : D’abord, je suis pour le processus de transition énergétique dans le transport, le logement afin de réduire la consommation énergétique et par voie de conséquence de réduire notre empreinte carbone. Réduire notre dépendance dans l’énergie fossile est un objectif politique valable. Bien que la loi ALUR ait enlevé le pouvoir de blocage de la minorité, la décision de l’ensemble des colotis pose problème dans le projet de loi de la transition énergétique. J’ai introduit - et cela a été accepté par le gouvernement - un amendement pour enlever le pouvoir de veto dans les prises de décision des propriétaires du dernier étage. Le parlement a rendu le mécanisme de décision beaucoup plus favorable aux travaux lourds de rénovation et de transition énergétique. Le problème est le financement car la multiplicité des propriétaires (et de leurs intérêts divergents) rend difficile de les convaincre sur le bien-fondé des travaux pour une économie d’énergies à terme. Comment faire ? J’ai aussi interrogé la ministre Pinel sur la difficulté d’imposer des logements locatifs dans le cas de logements réalisés par surélévation d’immeubles dans une copropriété à la fois par complexification de la gestion des copropriétés et de la difficulté d’imposer à des copropriétaires privés existants une cohabitation avec des logements sociaux s’ils ne le désirent pas ! Elle m’a répondu qu’en dessous de douze logements réalisés cette obligation de mixité de logements ne s’imposait pas. Cela ne répond absolument pas à la situation des grandes copropriétés. La surélévation des immeubles dans les grandes copropriétés est pourtant la seule solution pour assurer le financement de leur rénovation énergétique.
Je suggère la méthode suivante : le toit (dans la majorité des cas des copropriétés) offre un potentiel de construction (droits à construire)... qui seraient utilisé pour financer les travaux lourds. Autrement dit, la future vente de la charge foncière permettrait le financement des travaux et la réduction des charges de copropriété. C’est une adéquation gagnante-gagnante car on densifie la ville dans la cadre d’une transition énergétique voulue par tous. Néanmoins, un problème subsiste : la loi SRU et son obligation de construire des logements sociaux. La mixité sociale doit s’appliquer uniquement dans les nouvelles construction et non pas dans les copropriétés. Comment peut-on imposer des logements sociaux dans les grands copropriétaires ? Cette question pourrait même être posée au Conseil constitutionnel.

J2R : Les communes rurales sont aussi dans l’obligation de construire des logements sociaux depuis l’adoption de la loi ALUR(1). Quelle est votre position sur cette question délicate dans ce cas ?

J.-M. T. : Je trouve cela idiot. Les études d’impact n’ont pas été concluantes. A-t-on réfléchi à ce type de question ? Passer d’un taux de zéro logement social à vingt-cinq me semble impossible dans un délais de sept ou huit ans. Des petites communes, qui sont aussi entrées dans de grandes intercommunalités urbaines, se retrouvent soudainement soumises aux mêmes obligations que la grande interco en matière de logement locatif social, à savoir atteindre assez rapidement 20 ou 25 % de logement social alors qu’elles n’en avaient peut-être pas en y entrant. Si elles n’atteignent pas ces taux, elles sont alors soumises à un prélèvement financier quelquefois majoré. Pour y répondre, elles sont alors obligées de ne construire que du logement social pendant des années. Par exemple, une commune qui a 1000 logements sera obligée de construire 250 logements sociaux en une dizaine d’années, autant dire qu’elle ne construira que du logement social sur les seuls terrains disponibles dans cette période et elle sera donc amenée à concentrer ce parc de logement, ce qui va à l’encontre de la mixité sociale promue par le gouvernement. En outre, ces logements devraient être monoproduits, c’est-à-dire des logements sociaux (PLA ou PLS) qui posent d’autres types de problèmes car les règles d’urbanisme devraient être modifiées et cela créerait des quartiers sociaux à la sortie du village. J’avais déjà eu l’occasion de souligner ce problème lors de ma mission d’application sur la loi SRU. Le Gouvernement avait semblé y être sensible mais la ministre m’annonce seulement qu’il n’y aura pas de majoration de prélèvements durant trois ans pour ces communes ! La belle affaire, ça ne répond absolument pas au problème posé.

J2R : Peut-on intercommunaliser l’obligation de la loi SRU ?

J.-M.T. : Encore le dogmatisme chez Mme Duflot n’a pas permis d’avancer. Pour elle, mutualiser les objectifs en matière de logement social était une manière d’esquiver le problème pour les communes qui ne veulent pas de logement social. Cela peut se comprendre. Je proposerai plutôt un taux de logement social de 20 % au lieu de 25 %. Ensuite, le problème des équipements publics (médiatique, crèches, écoles...) exige de grands investissements dans le temps. Comment un village peut-il faire dans les années à venir pour subvenir à pallier ces besoins en équipement ? Pour moi la solution consiste à réduire le taux de logement social pour ramener à 20 % et exiger cela à un horizon de 2030-2035, quitte à émettre des amendes. Il faut du pragmatisme.

J2R : La décentralisation vit encore des réformes. Est-on sur la bonne voie ? Quelle est votre position sur la création d’un établissement de coopération intercommunal dans le Vallée de la Seine ?

J.-M.T. : D’abord, je suis partisan de la décentralisation. Cela dit, nous sommes en train de mettre en place des grandes agglomération de 400 000 à 1 million d’habitants. Nous sommes en train de passer à des échelles qui apporteraient certainement de la cohérence au niveau de l’aménagement du territoire, au niveau de l’attractivité économique et donc pour l’emploi. Mais je ne suis pas certain que l’on apporte du mieux en ce qui concerne la proximité et les services rendus à la population. Associer les habitants à la décision et à la gestion des communes n’est pas évident dans le cadre de ces nouvelles intercommunalités. Plus on construit de grandes agglomérations, plus on s’éloigne de l’habitant. Paris s’est fait au cours des siècles et en utilisant des mécanismes de dialogue et des négociations entre les différents arrondissements.

Là on met 73 communes et dans un délai court, on tente de créer une méga-agglomération. Les habitants sont perdus. Je ne suis pas partisan de ces méga-agglomérations. C’est un effet de mode qui tend à créer des structures de ce type dans tout le territoire.