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Publié : 15 octobre 2020

Politique Américaine

« L’Amérique : la facture », le cataclysme Donald Trump, analysé par le journaliste Jean-Luc Hess

L’ancien directeur de Radio France et de la radio France Inter, Jean-Luc Hess, publie l’ouvrage coup de poing L’Amérique : la facture. Ce livre tire un bilan cynique de l’administration Trump et invite à une perspective lointaine d’un renouveau des États-Unis.

En France, le ministère de la Santé préconise de manger cinq fruits et légumes par jour. Aux États-Unis, tweetez cinq fake news par jour et buvez de l’eau de Javel pour tuer le virus. « Amoureux  » des États-Unis, l’auteur de cet ouvrage a débuté sa carrière à Washington, consacrant au gré de l’actualité un volume de réflexion important à l’Oncle Sam. En 2018 Trump Fiction paraissait en librairie : il a réitéré, la même année, avec Ces psychopathes qui nous gouvernent. «  Il a la qualité d’avoir réussi à se faire élire, le seul élément positif émanant de sa personnalité. Le reste du temps il joue avec le monde tel qu’il le ferait avec une boîte d’allumettes », analyse-t-il, la voix rauque filtrant à travers un masque. Les états fédérés des années quatre-vingt, parangon d’un art de vie, dont il admet une littérature, un cinéma et des débats opposant démocrates et républicains sont devenus impossibles.

Incohérence et tweet compulsif

Durant quatre ans, le président américain aura posté entre cinquante-mille et soixante-mille messages sur Twitter, basant sa communication sur une aversion des médias. Peu après son élection, il a juré solennellement, la main sur la bible d’Abraham Lincoln, de respecter les textes fondateurs. Démarrant sa mandature dans une Amérique divisée, Donald Trump a fracturé davantage encore son pays ; les séquelles de ce clivage ont plongé les États-Unis dans une crise sociale, économique et sanitaire sans précédent. «  L’instrumentalisation de la radicalisation sous Trump ne permet plus les discussions, pourtant le Sénat et la Chambre des représentants délibéraient entre elles avant », a ajouté Jean-Luc Hees, achevant sa réflexion ainsi : « Avec Trump, l’impossible devient réalisable ».

D’après une étude américaine, le système actuel permet à un américain sur trois de bénéficier d’un emploi dont le salaire assure une qualité de survie face au virus. L’impossibilité du télétravail et une protection insuffisante sont le lot quotidien du même pourcentage, un américain sur trois.

« Law and disorder »

Le système collégial de vote par les grands électeurs a permis l’arrivée d’un populiste. La structure de la Constitution américaine aurait permis d’empêcher l’arrivée d’un tel candidat. L’abrogation de textes de loi, la diabolisation des médias, la désignation d’un ennemi commun sont autant de traits communs du populisme repris outre-atlantique. Une vague populiste a déferlé dans le Monde : investiture du président Jair Bolsonaro au Brésil, octroi de pleins-pouvoirs par Viktor Orban, restriction des libertés imposés par le président tchétchène, Ramzan Kadyrov…

Les manifestations qui ont ébranlé le pays lors de la mort de Georges Floyd ont obtenu pour réponse « l’Insurrection Act », un couvre-feu immédiat dans cinq états protestataires et la menace d’un recours à l’armée fédérale. Alors que l’État américain payait l’un des tributs les plus élevés au Covid-19, Donald Trump a préconisé de boire de l’eau de Javel et a gelé 20 % des crédits alloués à l’OMS.

L’OMC, l’ONU, l’Accord de Paris, le Conseil des droits de l’homme sont des instances désormais bannies du vocabulaire trumpiste. Le désintérêt manifeste de la politique étrangère brocarde la Maison Blanche et sa réputation transnationale. L’état-major américain a été questionné à de multiples reprises sur la nécessité de posséder l’arme atomique, si elle demeure inutilisée.

Le locataire de la Maison Blanche a été élu et maintenu au pouvoir en ayant intégré les angoisses du peuple américain. Son programme protectionniste masque l’érosion d’un déficit commercial face à la Chine. Faisant fi du système de protection des accords de Bretton Woods, du Gatt, Donald Trump invective Pékin mais aussi la France qui réclame une taxe de 3 % des bénéfices qu’engrangent les GAFAM. Désignant le vieux continent sous le qualificatif «  Europe allemande », celui-ci considère les États-Unis comme une menace positionnée avant la Corée du Nord, la Turquie et la Russie. Donald Trump entretient, par ailleurs, des liaisons dangereuses avec la Russie, l’Arabie Saoudite, le Yémen, renforçant l’apolarité du monde. « Le 4 novembre, Donald Trump sera probablement battu mais le Trumpisme continuera de perdurer », pronostique Jean-Luc Hess. 38 % des américains jugent satisfaisante la politique de Donald Trump, qui se déleste d’une facture salée, l’Amérique, davantage appréciée lorsqu’elle est impayée.

Un récit avec didactisme

L’ouvrage de Jean-Luc Hess est accessible aux lecteurs passionnés des États-Unis, mais également aux néophytes. Il est appréciable mais pas nécessaire d’avoir des connaissances contextuelles pour en saisir les informations essentielles. Certains faits d’actualité tels que la procédure d’impeachment et la guerre commerciale sino-américaine n’auront échappé à aucun, décortiqués au fil des chapitres. La politique populiste et ses ravages permettent la visualisation des futurs enjeux géopolitiques de la première puissance mondiale. Le lecteur est absorbé, rapidement, par cette œuvre littéraire, dotée d’un style soigné et d’une narration explicative. L’auteur, dont le parti pris est manifeste, justifie son récit avec didactisme par un parallèle entre les textes fondateurs et l’administration trumpienne. Quelques répétitions peuvent être notées au fil des chapitres, probablement pour maintenir en alerte le le lectorat. Il ne s’agit pas d’une enquête journalistique ou du fait d’un lanceur d’alerte, tel que Édouard Snowden avec Mémoires Vives et Bob Woodward, auteur de Fear and Fury. Ce livre constate l’accablement général d’une mandature sur le point de s’achever, dont la chute humaine est plutôt bouleversante, n’appartenant pas au domaine de la fiction.

L’Amérique : la facture de Jean-Luc Hees, Editions Baker Street, octobre 2020, 312 pages.

Post-scriptum

Pour commander le livre, contactez votre libraire ou bien le Furet du nord : https://www.furet.com/livres/l‑amerique-la-facture-jean-luc-hees-9782917559758.html