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Publié : 13 novembre 2020

Covid19

La pandémie, est-elle finie ?

La firme pharmaceutique Pfizer a annoncé un vaccin prometteur mais les malades de la Covid-19 continuent à affluer dans les hôpitaux de France. Voici l’analyse de Jean-François Grandin, qui suit les données statistiques depuis le début de la crise sanitaire.

Le constat reste alarmant malgré l’annonce de Pfizer. La courbe de la figure 1, ci-dessous, présente l’évolution du nombre quotidien de nouveaux patients Covid-19 en réanimation du jour J‑1 au jour J, lissée sur 7 jours. Vous conviendrez que cette courbe :
• Est évidente à interpréter. Observez bien la rupture du 14 octobre.
• Démontre que cette rupture est soudaine.
• Permet de comprendre ce qu’est un modèle linéaire avec rupture.

Des outils de prévision

Une telle rupture n’est pas prévisible, mais elle est détectable au plus vite. L’objectif du modèle linéaire avec rupture est de constater le plus rapidement possible des changements de régime. Le constat de la rupture du 14 octobre a été fait le 17 octobre avec une consolidation de 3 jours seulement. Pour les plus spécialistes d’entre vous, vous concevez qu’un modèle exponentiel est impropre à modéliser ces données et en particulier une rupture. Entre deux ruptures, on a une pente linéaire permettant d’estimer l’évolution avec une bonne précision à régime stable. Le modèle linéaire est le plus simple donc le plus prédictif. La première bosse correspond à la première vague. Vous observez que, depuis le 28 mai, on a une pente quasi linéaire (en jaune) jusqu’au 14 octobre, avec une lente augmentation.

Sur la nouvelle pente actuelle (après le 14 octobre), en rouge, et sans effet du confinement, on serait amené à 10 161 +-50 lits de réanimation occupés au premier décembre. Espérons que nous observerons, grâce au confinement et aux mesures barrières, une rupture de pente (changement de régime favorable) d’ici le 15 novembre, date à laquelle la même méthode estime 6170 +-30 lits de réanimation occupés. Le même type de courbe permettra de l’observer très rapidement. Je ne manquerai pas de vous l’indiquer.

Si on reste sur la même pente rouge et qu’elle ne s’infléchit pas vers le bas, la saturation des lits de réanimation sera donc atteinte et dépassée au premier décembre. La provision de lits de réanimation mobilisables étant de 9000 selon les déclarations d’Olivier Véran, le tri des malades commencera effectivement.
Un indice possible d’amélioration : depuis 3 jours le taux de positivité des tests s’accroît moins rapidement, ce qui ressort de la figure 2.

Fig. 2 Taux de positivité des tests (France)

Les erreurs commises

Toutes les marges de manœuvre ont été consommées dans l’insouciance d’un bel été de 2020 :
• Le temps que nous a laissé la pandémie pour nous organiser avant la 2e vague (5 mois) est maintenant épuisé et il n’a pas été suffisamment mis à profit pour augmenter les capacités hospitalières en réanimation.
• On n’a pas plus utilisé les conditions estivales pour stopper radicalement le virus. En effet, l’été, on vit dehors en espace libre et la cinétique virale est ralentie. Il aurait, toutefois, fallu un peu plus réglementer ce que j’appelle les covidas* soit des rassemblements massifs sans protection. Pourtant, on pouvait savoir que le virus était là : le 4 juin, j’écrivais dans mon livre page 72 « Ce qui est sûr, c’est qu’au 4 juin le virus est toujours là. Même si le nombre de cas est réduit, c’est quand même autour de 500 cas (par jour) et le virus ne demande qu’à repartir en Covida.* ». A la sortie de l’impression, j’ai envoyé ce livre à Emmanuel Macron et Olivier Véran.

On commence à s’apercevoir avec 3 mois de retard qu’il faut des tests rapides (résultat en 30 minutes) afin de pouvoir isoler rapidement les cas positifs. Aujourd’hui une étude britannique nous indique que seuls 10 % des cas positifs seraient mis en isolement. C’est très probablement la même situation en France. Un résultat immédiat du test suivi, pour les cas positifs, d’un entretien médical résoudrait en grande partie cette situation. Même avec le confinement, vous n’êtes pas à l’abri de faire vos courses au côté des contaminés.

On n’a pas plus essayé d’organiser l’économie. Toutes les mesures sont annoncées, au jour le jour, quasiment sans préavis, ce qui aggrave les difficultés pour les chefs d’entreprise. De plus, les règles de concurrence sont faussées. En ce moment, Amazon et autres GAFA se gavent de profits sans payer ensuite les impôts dus. Pour sauver l’économie, préférez les produits et les commerçants locaux, même s’ils sont plus chers ; de plus, vous y gagnerez en qualité et en rapports humains. Commandez auprès des commerçants locaux, restaurants compris, ils seront ravis de vous servir à domicile. Faîtes-le pour tous les types de commerce, donc alimentaires au sens large : librairies, jouets, audiovisuels, fleuristes, coiffeurs, instituts de beauté… Pourquoi ne pas mettre en place une fréquentation alternée des commerces comme on fait une circulation alternée des véhicules, ou des rendez-vous pour une heure fixée ?

Et que dire de l’école ? On est en train de former une génération de laissés pour compte, privés de culture ; aujourd’hui les niveaux baissent partout. Là encore, une organisation est possible, basée sur Internet et un présentiel tournant mais peu a été prévu si ce n’est, en Île-de-France, la distribution d’ordinateurs avec Valérie Pécresse et Alexandra Dublanche, que je salue.

Comparaison international de nouveaux cas quotidiens.

Si l’économie s’effondrait, il n’y aurait plus d’école, plus d’administration, plus de commerce, plus de police, plus d’hôpitaux. Retour à l’état sauvage ! Peut-être, certains apprécieront. Du fait, la France est un pays qui a mal géré la crise comme le montrent les courbes 3.n et 4.n ci-dessous. L’Allemagne, l’Italie et même l’Espagne réussissent mieux que la France mais ce n’est pas non plus la grande réussite. En Belgique c’est la catastrophe. Je ne dis pas que c’était facile ! Sur ces courbes les chiffres sont normalisés par millions d’habitants. Seules les courbes normalisées peuvent être utilisées pour comparer les pays entre eux. A titre informatif, je donne les courbes brutes 3 et 4 non normalisées. Comme tous les mauvais élèves, on cherche à copier les uns sur les autres sans réfléchir par soi-même et en se disant que si on se trompe ce ne sera pas mieux chez les autres.
Cependant, je ne renonce pas et j’espère que la raison reviendra et triomphera. C’est clair, il va falloir faire beaucoup mieux !
Comme je l’ai dit et répété : les solutions existent. Il faut avoir le courage d’en débattre, de sélectionner les meilleures, puis de les appliquer. Je me dois d’en livrer quelques-unes sinon on me reprocherait un discours sans consistance.

Les actions et, peut être, les solutions

Centrer les actions sur la population vulnérable serait, dit-on, discriminatoire voire non constitutionnel mais cette mesure est fondamentale. Elle préserve les plus fragiles qui forment le plus gros du flux des patients en réanimation tout en préservant l’économie. Ne faisons pas n’importe quoi. On parle de vies humaines. Toutefois, il ne faut pas imposer aux plus fragiles le confinement. Il faut leur expliquer les risques encourus et les médecins sont là pour les convaincre, eux et leurs familles. Il faut ensuite leur fournir la couverture sociale, un accompagnement économique et les moyens de leur confinement.

Avoir la politique de tests rapides que j’ai présentée plus haut est également indispensable mais n’oublions pas d’autres mesures secondaires telles que les suivantes :
• Pour permettre les fêtes familiales de fin d’année, mettre à disposition des familles des autotests rapides. Adopter le masque même à l’intérieur des familles sauf si la non-contamination de tous les membres été vérifiée.
• Equiper, comme dans certains pays, les salles de classe et les EHPAD avec des purificateurs d’air qui éliminent 99,9 % des bactéries. S’équiper également pour ceux qui le peuvent.
Je vois également deux écueils :
• Le premier c’est de maintenir l’école en présentiel total pour les collégiens et lycéens.
• Le second c’est l’usage des transports en commun. Le bon sens nous indique qu’ils sont des endroits propices aux contaminations mais, pour le moment, on ne sait pas les comptabiliser. C’est un des grands résultats que j’attends de l’application Stop-Covid. Cependant, comment aller travailler,pour la plupart, sans transports en commun ?

Surtout, il faut réussir la sortie du nouveau confinement en atteignant un niveau très bas de nouveaux cas quotidiens de Covid-19 et ne pas se croire sauvé comme cela a été le cas quand, le 11 mai, on avait constaté un plateau à 500 cas en constante augmentation lente. On en voit aujourd’hui les conséquences. 500 c’est très loin de 0. J’estime qu’atteindre et maintenir un plancher à moins de 10 cas est un objectif à se donner pour contrôler et donc éviter une 3e vague. Clairement, avec cet objectif, je ne vois pas de sortie efficace avant le 1er février 2021.

Au 31 mars, on atteignait le pic de la première vague. Le déconfinement a eu lieu le 11 mai avec encore 500 contaminations par jour. Le 31 mai aurait été une meilleure date pour atteindre le seuil des 10 cas quotidiens. Il faut donc 2 mois pour voir s’éteindre le pic de pandémie. Si on atteint le pic le 1er décembre, il faudra donc attendre le 1er février 2021, alors que le premier confinement avait été plus sévère.

Il faut donc réinventer, avec discernement, une économie qui permette à tous de passer la crise, en particulier préserver les secteurs de la culture et de la restauration. Il faut qu’à l’exception des populations fragiles tous puissent travailler. Il ne faut pas penser qu’aux victimes actuelles de la Covid-19 mais aux victimes futures de la crise économique, qui risquent d’être beaucoup plus nombreuses.

Soyons volontaires, soyons solidaires, appliquons et faisons appliquer les bonnes mesures. Achetons des produits et des services locaux. Réfléchissons. Éduquons nos proches et nos amis. Réinventons l’économie. Exhortons nos gouvernants à penser, à soumettre leurs réflexions à l’analyse, à argumenter, à débattre puis présenter leurs conclusions. Ainsi, nous y arriverons, tous ensemble !
« Vive la vie et mort au Covid ! ».

Texte achevé le 7 novembre 2020