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Publié : 7 juillet 2022

Immobilier

Immobilier : Ralentissement attendu après un très bon 1er semestre

Knight Frank dresse le bilan du marché français de l’investissement en immobilier d’entreprise à la fin du 1er semestre 2022. La publication de ce communiqué permet de faire un état des lieux de la conjoncture immobilière en France.

Après un bon début d’année, l’activité est restée soutenue au 2e trimestre sur le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise. « Après 5,4 milliards d’euros investis en France au 1er trimestre, 5,6 milliards l’ont été au 2e trimestre. Ce volume porte à 11 milliards l’ensemble des sommes engagées au 1er semestre 2022, soit une hausse de 20 % par rapport à la même période l’an passé et de 15 % par rapport à la moyenne décennale » annonce David Bourla, Directeur des Études chez Knight Frank France. Toutefois, ce résultat s’explique en grande partie par la finalisation de transactions initiées depuis de longs mois, dans un tout autre contexte de marché ; il ne traduit donc pas encore l’impact sur le marché immobilier de la dégradation du climat économique et, surtout, de la forte remontée des taux d’intérêt et du resserrement des conditions de financement. « En quelques mois, les conditions de marché ont radicalement changé, ce qui pousse certains investisseurs à revoir leur stratégie et complique les négociations, sur le segment des grandes transactions en particulier » poursuit David Bourla.

L’Ile-de-France retrouve un peu de sa superbe

Jusqu’à présent, ce créneau de marché a été robuste avec 30 opérations de plus de 100 millions d’euros recensées au 1er semestre 2022 en France contre 22 à la même période l’an passé. Ces trois derniers mois, l’activité s’est en outre accélérée sur le segment des opérations de plus de 200 millions d’euros. Leur nombre est ainsi passé de trois au 1er trimestre à six au 2e trimestre, majoritairement réalisées au profit d’acquéreurs français qui ont ainsi accru leur domination, représentant 62 % des volumes investis dans l’Hexagone sur l’ensemble du 1er semestre 2022. Par ailleurs, quatre des six opérations de plus de 200 millions d’euros du 2e trimestre concerne l’Ile-de-France. « La région parisienne a retrouvé un peu de sa superbe au 2e trimestre 2022, voyant sa part passer de 62 % des volumes investis en France à la fin du mois de mars à près des deux tiers à la fin du mois de juin. Celle-ci était toutefois de 75 % en moyenne lors des cinq années précédant la crise sanitaire » relativise David Bourla. La part des régions a quant à elle mécaniquement baissé. L’activité y demeure néanmoins dynamique, avec un nombre relativement élevé de grandes transactions signées sur les marchés des commerces, de l’industriel et des bureaux.

Bureau : du mieux par rapport au trimestre précédent

Le marché des bureaux s’est redressé au 2e trimestre 2022, avec 3,4 milliards d’euros investis dans l’Hexagone contre 2,7 milliards au trimestre précédent. Sur l’ensemble du 1er semestre, les sommes engagées sur le marché français des bureaux s’élèvent à 6,1 milliards d’euros, soit une légère hausse de 2 % par rapport au 1er semestre 2021 mais une baisse de 5 % par rapport à la moyenne décennale et même de 16 % par rapport aux cinq années précédant la crise sanitaire. «  La performance mitigée des bureaux confirme la tendance observée depuis le début de la crise sanitaire : ces derniers ne sont plus ultra-dominants et l’activité est mieux répartie avec les autres classes d’actifs. A eux deux, les commerces et les actifs industriels n’avaient d’ailleurs, à l’exception de 2014, jamais réuni des volumes aussi élevés au 1er semestre  » indique David Bourla. Lors des six premiers mois de 2022, les bureaux n’ont ainsi représenté « que » 55 % des sommes investies sur le marché français de l’investissement en immobilier d’entreprise contre 70 % en moyenne depuis dix ans.

Ce ralentissement doit toutefois être nuancé car les performances diffèrent parfois de façon importante selon les secteurs géographiques. Ainsi, le marché des bureaux reste très animé en région, avec des volumes en hausse de 20 % sur un an et de plus de 50 % par rapport à la moyenne décennale. Ce dynamisme tient notamment à la réalisation de très grandes opérations. La cession au 2e trimestre à PERIAL de la tour «  La Marseillaise » pour près de 250 millions d’euros succède ainsi à l’acquisition au trimestre précédent par ATREAM et PRINCIPAL GLOBAL INVESTORS des 28 000 m² de l’immeuble « Urban Garden » à Lyon pour 150 millions environ. D’autres transactions majeures sont attendues au 2nd semestre, à Lyon et Lille notamment. L’attrait croissant des régions est aussi illustré par la montée en puissance de métropoles de moindre envergure.

Le bilan est plus mitigé en Ile-de-France, où les volumes investis en bureaux au 1er semestre 2022 sont inférieurs de 2 % à ceux de la même époque l’an passé et en baisse de 14 % par rapport à la moyenne décennale. Cette chute s’explique notamment par la faiblesse des sommes engagées dans certains pôles tertiaires habituellement moteurs, comme le Croissant Ouest où les cessions supérieures à 50 millions d’euros se comptent sur les doigts d’une main. Ce manque de vigueur est à mettre au regard des résultats du marché locatif de ce vaste secteur, pénalisé par les stratégies de rationalisation des utilisateurs et un nombre restreint de grandes prises à bail. Les prochains mois diront si ce ralentissement n’était que temporaire : plusieurs actifs de grande taille ont récemment été mis sur le marché, dont la commercialisation permettra de tester la confiance des investisseurs et la résistance des prix. Les cessions ont également été rares à La Défense, même si l’activité locative y est plus dynamique. Enfin, après un début d’année marqué par quelques grandes transactions dans le Nord, les volumes investis n’ont pas décollé en 1ère Couronne et resteront probablement modestes en 2022. Le Nord, l’Est et le Sud, qui avaient bénéficié ces dernières années de l’intérêt des investisseurs pour les futurs hubs du Grand Paris Express et d’un nombre important de VEFA, voient pour le moment cet attrait faiblir sur fond de reprise encore incomplète du marché locatif.

« Dans ce contexte, Paris renforce son leadership en Ile-de-France. La capitale compte pour 51 % des sommes engagées au 1er semestre 2022 sur le marché francilien des bureaux contre 35 % à la même période l’an passé. Paris bénéficie pleinement du dynamisme de son activité locative et de son statut de valeur refuge, tandis que les arbitrages opérés par quelques investisseurs français ont permis d’alimenter le marché en grandes offres de qualité » analyse David Bourla. Parmi les transactions de bureaux supérieures à 100 millions d’euros signées au 2e trimestre figurent ainsi les cessions de deux grands ensembles tertiaires du 15e arrondissement : la vente par PRIMONIAL REIM à SFL du 91–93 boulevard Pasteur et celle par COVIVIO à CREDIT AGRICOLE ASSURANCES de sa quote-part dans « Carré Suffren ». Les arrondissements du Nord et de l’Est se sont également distingués grâce aux deux cessions opérées par ICADE pour 400 millions d’euros environ (GAMBETTA VILLAGE acquis par PRIMONIAL REIM, LE MILLENAIRE 4 vendu à GCI et BLACKROCK). Dans le QCA, quelques grandes opérations ont aussi été recensées, à l’exemple de l’achat par M&G REAL ESTATE de « Rio » dans le 8e ou de la cession à KANAM d’«  Opéra Italiens » dans le 9e, qui ont directement contribué à la hausse de 27 % sur un an des volumes investis en bureaux dans le quartier d’affaires.

Les commerces, de retour au premier plan

Le 2e trimestre a confirmé le retour des commerces sur le devant de la scène, malgré une diminution de 23 % par rapport au trimestre précédent. «  Depuis janvier, les sommes engagées sur le marché français des commerces totalisent plus de 2,6 milliards d’euros contre un peu moins d’1 milliard il y a un an. La hausse est même de 42 % par rapport à la moyenne décennale, faisant du 1er semestre 2022 le meilleur de l’histoire pour les commerces après la performance hors norme de 2014 qui avait vu la vente de Beaugrenelle et de grands portefeuilles de centres commerciaux  » annonce David Bourla. Alors qu’il avait atteint en 2021 son niveau le plus bas depuis 2009, l’investissement en commerces semble donc bien s’être relevé du choc créé par la crise sanitaire grâce aux nombreuses opportunités offertes par cette classe d’actifs, entre biens sécurisés répondant à la demande de stabilité de certains investisseurs et biens à revaloriser offrant des rendements élevés grâce à des valeurs réajustées. «  Outre la hausse du nombre total de transactions, la répartition équilibrée des volumes investis entre rues commerçantes, parcs d’activités commerciales et centres commerciaux est également un signe positif, témoignant de la profondeur du marché français et de la solidité de la reprise » ajoute David Bourla.

Fait significatif, ces différentes classes d’actifs ont toutes été animées par des cessions de portefeuilles, à l’origine de 47 % des sommes engagées sur le marché français des commerces au 1er semestre 2022. Plusieurs de ces opérations ont été recensées sur le marché des parcs d’activités commerciales qui, après avoir connu en 2021 l’une de ses meilleures années, continue de capitaliser sur l’attrait exercé auprès des investisseurs en raison de sa résistance à la crise sanitaire. Avec 720 millions d’euros, les parcs d’activités commerciales rassemblent ainsi 27 % des volumes investis sur le marché des commerces au 1er semestre 2022 grâce notamment à quelques grandes opérations dont la cession d’un portefeuille de magasins DECATHLON à BNP PARIBAS REIM. De nombreuses cessions d’actifs unitaires, retail parks de taille intermédiaire et «  boîtes » ont également animé le marché et continueront de le faire ces prochains mois, plusieurs dossiers plus ou moins importants étant en cours de finalisation. «  Le succès des parcs d’activités commerciales devrait également perdurer du fait d’un positionnement bien adapté aux restrictions pesant actuellement sur le budget des ménages, même si l’impact de la forte hausse du prix des carburants sur la fréquentation des commerces reste à mesurer » estime David Bourla.

Malgré un nombre bien plus réduit de transactions, les centres commerciaux et les galeries rassemblent une part très légèrement supérieure à celle des parcs d’activités commerciales grâce à la vente en début d’année par UNIBAIL-RODAMCO-WESTFIELD à SOCIETE GENERALE ASSURANCES et BNP PARIBAS CARDIF de 45 % de « Carré Sénart » ainsi qu’à deux cessions significatives du 2e trimestre : la vente des « Flâneries » à La Roche-sur-Yon et celle par CARMILA à BATIPART et ATLAND d’un portefeuille comptant plusieurs galeries. Les portefeuilles expliquent aussi le regain de vigueur des rues commerçantes, avec la finalisation de la vente de murs de GALERIES LAFAYETTE à la SOCIÉTÉ DES GRANDS MAGASINS et celle de plusieurs portefeuilles de boutiques en France et à Paris, comme l’achat par SELECTIRENTE de 22 magasins situés au cœur de la capitale pour 72 millions d’euros. «  Ces opérations ont compensé le nombre encore restreint de cessions sur les artères prime parisiennes qui, traditionnellement, gonflent les sommes engagées sur le marché des pieds d’immeubles. Parmi celles-ci, notons tout de même la vente par MARK à ALLIANZ de l’ancien Pershing Hall, 49 rue Pierre Charron dans le 8e, actif mixte abritant le concept-store KITH » précise David Bourla. Pour finir, l’alimentaire suscite toujours autant l’intérêt des investisseurs en raison de sa résistance aux fluctuations de la consommation. Après avoir rassemblé en moyenne 800 millions d’euros par an depuis 2018 et près de 500 millions l’an passé, ce segment de marché totalise plus de 250 millions d’euros au 1er semestre 2022, dont une majorité liée à de nouvelles cessions d’hypers CASINO.

Industriel : rythme de croisière

« Comme au 1er trimestre, le marché de l’industriel arrive derrière les bureaux et les commerces à la fin du 2e trimestre 2022. Ses performances se stabilisent néanmoins à des niveaux élevés, confirmant le statut désormais bien établi de cette classe d’actifs dans le paysage immobilier français. Ainsi, un peu plus d’1 milliard d’euros ont été investis sur le marché français de l’industriel au 2e trimestre, portant à 2,3 milliards l’ensemble des sommes engagées au 1er semestre 2022 » détaille David Bourla. Ce volume équivaut quasiment à celui du 1er semestre 2021 et est supérieur de 13 % à la moyenne décennale.

Comme pour les commerces, les portefeuilles ont joué un rôle décisif dans les bons résultats de l’industriel, concentrant 45 % des volumes investis. Si la valeur de deux portefeuilles vendus au 2e trimestre dépasse 150 millions d’euros, aucun n’a toutefois atteint le montant de la transaction phare du début d’année 2022 : la vente par BLACKSTONE à GLP de «  Trio  » pour 350 millions. Dominé par l’activité d’investisseurs anglo-saxons et allemands, le 2e trimestre a également vu la finalisation de plusieurs transactions unitaires supérieures à 50 millions d’euros, notamment sous la forme de VEFA en blanc comme la plateforme logistique de 100 000 m² à Noeux-les-Mines achetée par MACQUARIE. Cet attrait croissant pour l’industriel continue de maintenir les taux de rendement prime à leur niveau plancher. Les prix du foncier sont également sous pression. Plusieurs investisseurs se positionnent en effet sur de vastes terrains ainsi que sur de grandes friches à réhabiliter afin de sécuriser le développement de nouvelles opérations malgré l’objectif «  zéro artificialisation nette  » (ZAN).

Quelles perspectives pour les mois à venir ?

L’acquisition de biens à réhabiliter et à transformer restera ces prochains mois l’un des moteurs du marché français, sur le segment de l’immobilier industriel comme sur ceux des bureaux et des commerces. «  Permettant de se conformer aux objectifs de développement durable et de répondre à la demande des utilisateurs en adaptant les bâtiments aux nouveaux usages, l’amélioration de l’existant constitue pour les investisseurs l’un des grands axes de création de valeur, à l’heure où le core reste très recherché » explique David Bourla. L’appétit pour les actifs les plus sécurisés ne devrait pas faiblir. De fait, le ralentissement de la croissance économique et les difficultés croissantes de trésorerie des entreprises pourraient fragiliser les marchés locatifs, ce qui augmentera l’aversion au risque des investisseurs. Plusieurs autres tendances observées depuis le début de la crise sanitaire seront confortées, qu’il s’agisse du rééquilibrage de l’activité entre l’Ile-de-France et les régions ou de l’accélération des stratégies de diversification au profit d’actifs alternatifs et défensifs comme l’immobilier résidentiel.

L’appétit pour le Core pourrait maintenir la pression sur les taux de rendement
prime. Toutefois, la hausse brutale des taux d’intérêt et la flambée de l’inflation annoncent un mouvement de repricing dont la portée est encore difficile à évaluer. « Dans ce contexte très incertain et face aux perspectives de réajustement des valeurs, nous sommes entrés depuis quelques semaines dans une période d’attentisme marqué. Les investisseurs remettent en effet à plat leur stratégie de cession ou d’acquisition pour l’adapter au changement radical d’environnement financier, ce qui a d’ores et déjà conduit certains vendeurs à retirer leur offre du marché. Un ralentissement de l’activité est donc probable, après un 1er semestre qui restera néanmoins comme l’un des meilleurs de l’histoire  » conclut David Bourla.