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Publié : 31 août 2023

Pont d’Achères

Pont d’Achères : le combat commence maintenant !

Beaucoup de contestataires ont questionné, le 28 août à Achères, les représentants du département des Yvelines sur le projet de liaison routière entre la RD 30 et la RD 190, comprenant la construction d’un nouveau pont entre Achères et Carrières-sous-Poissy. Des habitants et des membres d’associations ont planté le décor : ce projet, qui comporte des risques environnementaux, serait très coûteux pour les finances départementales ainsi que pour le cadre de vie ; toutefois, les porteurs du projet continuent à souligner l’intérêt général de ce projet vieux de 40 ans. En réalité, le combat commence maintenant à deux niveaux : juridique et démocratique.

Le monde associatif(1) s’est mobilisé, même dans cette période de fin de vacances estivales, pour être sur le champ d’action et dénoncer le projet de « Liaison RD 30-RD 190/Pont d’Achères  » ; environ 150 personnes ont assisté à une « réunion d’information » présentée par Richard Delepierre, maire du Chesnay, 3e vice-président du conseil départemental des Yvelines, délégué aux Mobilités et aux Transports. Certes, cette réunion était un moment incontournable pour des élus(2) qui voulaient davantage s’informer pour, ensuite, réagir. En effet, c’était une sorte de rentrée politique au cours de laquelle le maire d’Achères, Marc Honoré, a accueilli tout ce monde avec son infatigable sourire d’apparatchik des années 1960.

Un projet qui favoriserait l’attractivité et l’économique

Achevée le 20 janvier dernier, l’enquête publique relative au projet « démesuré » du Conseil départemental des Yvelines, de créer une 2x2 voies entre le pont de Triel et Achères, comprenant un franchissement de la Seine entre Achères et Carrières-sous-Poissy, a ravivé l’opposition des citoyens et du monde associatif local. Des recours, des pétitions, des manifestations, notamment celle du 15 janvier 2023, se sont succédé sans vrai impact sur le déroulement des événements pour le département des Yvelines, maître d’ouvrage de ce projet autoroutier. L’arrêt préfectoral relatif à ce projet avait été publié le 3 juillet dernier, après le rejet de divers recours.

Pour les instigateurs de ce projet, deux arguments continuent à peser :
- Le désengorgement du « centre-ville de Poissy » réduirait sa pollution et permettrait un cadre de vie plus paisible pour les habitants de Poissy.
- L’attractivité du territoire serait accrue grâce à de nouvelles infrastructures qui faciliteraient les constructions et la création d’emplois.

Malgré le caractère défavorable de la majorité des interventions du public, Suzanne Jaunet, conseillère départementale des Yvelines et vice-présidente de GPS&O, a maintenu son appui au projet : « Tout le monde attend Eole côté rive gauche de la Seine ; [alors] le Pont d’Achères est le lien entre les deux Rives de la Seine car il va permettre des liens entre les habitations et les lieux de travail et entre les équipements sportifs  ». Pour elle, il faut dédramatiser l’enjeu car c’est dans l’intérêt de la Communauté urbaine Grand Paris Seine & Oise. Patrick Meunier, digne représentant de cette orientation économique, a écrit sur sa page Facebook après la réunion publique : «  J’ai connu le débat public sur l’A104, on prend les mêmes et on répète… [Le public présent n’avait] pas un instant de préoccupation pour l’attractivité du territoire et l’implantation des entreprises sur la rive droite ou la rive gauche, ni le transport des marchandises. [C’était, pour lui] une lecture fragmentaire et tendancieuse des dossiers et du schéma directeur Île-de-France, qui prévoit entre autres, la construction de logements nombreux sur le secteur, et le maintien voire le développement de l’industrie en Île-de-France. »

Déjà en 2013, ces arguments avaient été utilisés en faveur du projet néfaste de l’A104 entre Orgeval et Cergy. Le maire de Carrières-sous-Poissy de l’époque avait même évoqué la création de 2500 emplois dans la boucle de Chanteloup avec le projet mort-né de la ZAC Ecopôle et le projet de port industriel de Triel ! Effectivement, on prend les mêmes et on recommence.
De quel intérêt général est-il question ?

Dans un débat incisif comme celui-ci, la notion de l’intérêt général est, maintes fois, utilisée à tort et à travers. Les promoteurs l’ont avancé comme étant le nec plus ultra de leur démarche ! « L’intérêt général nous guide », a martelé M. Delepierre, qui a usé, même abusé, de l’utilisation de ce terme. Intérêt général et à quelle échelle ? Départementale, intercommunale ou communale ? Parfois, l’institution initiatrice du projet est qualifiée, à tort, d’incarnation de l’intérêt général. Il se peut que le département des Yvelines rejoigne ainsi d’autres institutions qui ne portent plus l’intérêt général et semblent « illégitimes » pour la population, notamment pour des électeurs, qui ne leur font plus confiance. Cela s’ajoute à des agissements, jugés néfastes par certains, de son président Pierre Bédier depuis quelques années. En substance, l’intérêt général peut être élaboré, conçu en deux temps : réflexion des candidats à une élection donnée sur un territoire et élection légitime sur tel ou tel territoire pour mettre en avant une vision du futur de ce territoire. Or, l’est de la communauté urbaine GPS&O est un des patchworks de ce territoire mal né et, surtout, sans aucune légitimité démocratique ; en effet, les élus de ce territoire ne représentent pas cette vaste intercommunalité, mais plutôt les intérêts, éparpillés, de chacune de ses 73 communes. Pour preuve, personne n’a été capable, jusqu’à ce jour, de nous présenter et défendre un projet de territoire de Grand Paris Seine & Oise car il n’existe évidemment pas.

En outre, lors de la réunion, a été mis en évidence le hiatus entre ces élus « porteurs » du projet et la population qui «  pense ou souhaite » une autre version de l’intérêt général : plus d’intermodalité, plus de circulations douces, respect du mode de vie (et donc moins de pollution et de bruit) et préservation de la biodiversité. On ne se comprend plus de tout… car on se coupe la parole ; certains paraissent être donneurs de leçons. Par exemple, Patrice Besnard, andrésien, qui avait interpellé son maire, Lionel Wastl, pour son inaction sur ce dossier, a souligné qu’il « ne croit plus à la vertu des réunions publiques convenues et [y perd son] temps d’autant que des premiers retours, il ressort que c’était langue de bois.  »

Un projet plein de contre-vérités et d’embûches

En réalité, le projet pose des problèmes classiques sur les plans de l’économie et de l’environnement. Les arguments suivants le justifiant ne sont pas acceptables selon les riverains :
- L’estimation du nombre de voitures qui traverseraient le pont (40 000 par jour) est contestée par la majorité du public ;
- La compensation de l’utilisation de 27 ha de surface d’emprise est jugée risible ;
- L’impact carbone (93 700 équivalent tonnes durant trois ans) semble sous-évalué.

De plus, « C’est une atteinte à la santé publique », a écrit Victor Blot dans sa réaction dans sa page FB, car 48 000 morts par an sont constatés par la pollution automobile. [Pour lui] c’est également une atteinte et une accéleration du réchauffement climatique par augmentation du bilan carbone. Enfin c’est une atteinte économique coût du projet 200 millions d’euros qui seraient bien plus utiles pour développer les transports collectifs dans notre région dépourvue notamment le T13 jusqu’à Cergy. » Dans une période de disette budgétaire, c’est un enjeu majeur pour le département qui accuse une perte de recette de 150 millions d’euros en raison de la chute du marché immobilier.

Les promoteurs du projet considèrent que les travaux commenceront au début de l’année 2024. Certains obstacles juridiques pourraient, toutefois, apparaître à l’horizon. Denis Millet a mis en avant le fait que ce projet est contraire aux engagements de la France dans le cadre des accords de Paris puisque, notamment, il ne respecte pas la neutralité carbone. Un autre obstacle pourrait être la loi sur le respect de la biodiversité car Anthony Effroy a décelé une faille dans le projet ; ce type d’argument sera certainement appuyé par un argumentaire solide dans les prochains recours (gracieux pour le moment) des associations unies contre ce projet.

En conclusion, selon nos sources, les communes d’Andrésy, de Carrières-sous-Poissy et, certainement, le front uni d’associations vont déposer des recours qui vont, au moins, retarder la construction de ce pont entre Achères et la plaine de Chanteloup. Questionné sur ces contentieux à venir, un des promoteurs du projet a expliqué que l’on « avance et si le juge administratif juge nécessaire d’arrêter, on arrêtera car le département ne veut pas passer au forceps !  » Voilà un angle d’attaque pour les défenseurs du cadre de vie, comme par exemple Victor Blot, qui a lancé un appel à la mobilisation générale et a demandé « la création d’un rapport de force avec occupation des lieux comme à Notre-Dame-des-Landes…car les dignitaires du régime ne reculent que contraints et forcés…  » La bataille du Pont d’Achères a commencé !

Lien URL de la vidéo de l’intégralité de la réunion du 28 août 2023 à Achères

Post-scriptum

Notes :

1. ADIV Environnement, Bien Vivre à Vernouillet, CO.P.R.A 184, Non au Pont d’Achères, Rives de Seine Nature Environnement, Sequana Collectif Citoyen, Triel Environnement. Par ailleurs, le collectif citoyen GSPS&O a encouragé les habitants à se mobiliser et à assiter à la réunion du 28 août à Achères.

2. Personnalités présentes dans la salle :
Du côté du département des Yvelines, Richard Delepierre, maire du Chesnay, 3e vice-président du CD des Yvelines et délégué aux Mobilités et aux Transports, a défendu le projet. Il a été épaulé par Suzanne Jaunet, conseillère départementale des Yvelines et vice-présidente de GPS&O. A été notée l’absence de Catherine Arenou, 4e vice-présidente du CD 78 et vice-présidente de GPS&O. Du côté de l’administration du département des Yvelines, Mme Seniguette (CD78) et Mme Chive (CD78) ont pris la parole pour répondre à certaines questions.

Étaient également présents Eddie Aït, maire de Carrières-sous-Poissy, Cédric Aoun, maire de Triel-sur-Seine, et Lionel Wastl, maire d’Andrésy, accompagné d’Isabelle Guillot, son adjointe, chargée de l’environnement.